La réforme des rythmes scolaires, c’est quoi ?
Le point de vue de l’Etat
En se basant sur des études démontrant que l’attention des petits écoliers était plus élevée le matin que la fin de journée, l’Etat a décrété que l’école devait changer. L’Etat nous a donc pondu une réforme appelée « réforme des rythmes scolaires « ou plus pompeusement, « refondation de l’école ».
Les enfants bénéficieront des apprentissages fondamentaux (lecture, écriture, calcul) le matin, à un moment où ils sont pleinement attentifs. La fin d’après-midi sera elle consacrée à la découverte à des activités nécessitant moins d’attention comme la découverte d’activités artistiques, sportives ou scientifiques pendant les TAP (temps d’activités pédagogiques).
Un des aspects controversés de la réforme est que les apprentissages devaient aussi avoir lieu sur 9 demi-journées, contre 8 demi-journées (4 jours) avant la réforme. Les enfants ont donc classe une demi-journée supplémentaire, soit le mercredi matin, soit le samedi matin.
La réalité à la rentrée 2014
Les communes avaient la possibilité de mettre en place cette réforme dès la rentrée 2013, mais en pratique, seule une petite minorité (un peu plus de 20% des communes) l’ont fait.
Par contre, à la rentrée 2014, toutes les communes étaient contraintes de mettre en place la réforme des rythmes scolaires. Seules 23 communes (sur les 24 000 comptant une école publique) s’exposent à des sanctions de l’Etat en mettant à exécution leur menace de refuser d’ouvrir avant-hier, premier mercredi de rentrée. En effet, il faut savoir que cela représente un coût pour les communes (en moyenne 150€ par enfant), principalement des coûts de personnel (animateurs) pour encadrer les enfants pendant les TAP.
Ma commune a été honnête avec la réforme ; elle a respecté les grands principes de cette refondation en mettant en place un PEDT (projet éducatif territorial), un programme d’animations pendant les TAP en quelque sorte. Les animateurs des centres de loisirs ont bâti un programme d’activités sur 6 semaines incluant des activités sportives ou artistiques. Beaucoup de communes ont choisi de contourner les grands principes de la réforme, notamment la mise en place de d’activités pédagogiques complémentaires. J’ai deux exemples de mamans où dans leur commune, on a tout simplement allongé les récréations de 10 minutes ou mis en place une grande récréation de 16à 16h30 dans le seul but d’éviter des frais liés à l’embauche d’animateurs supplémentaires, et ce malgré les aides de l’Etat accordées pendant les 2 première années au moins (pourquoi se ferait-on chier n’est ce pas ?).
Le point de vue de la maman
Je suis en congé parental partiel (communément appelé 80%) depuis septembre 2009, depuis la naissance de mon deuxième enfant. Concrètement, je travaille sur 4 jours (lundi, mardi, jeudi & vendredi) et j’ai mon mercredi de libre pour vaquer à mon deuxième « travail », celui de maman. La CAF (caisse d’allocations familiales) me versera un complément de salaire de 145.63€ jusqu’aux 3 ans de ma petite dernière. Côté budget, certes je perdais près de 300€ de salaire en réduisant mon temps de travail, mais si on fait le calcul de ce que me verse la CAF et de ce que j’économise en n’allant pas au travail le mercredi (garderie des enfants, essence, cantine), j’étais gagnante. Et surtout, cela me permettait de passer plus de temps avec mes enfants. Le mercredi, même si au début j’en profitais pour vaquer à mes tâches domestiques (ménage, lessive, courses), je m’étais petit à petit forcée à laisser les tâches ménagères de côté et à profiter de ce temps passé avec les enfants pour faire des activités de loisirs créatifs ou d’éveil artistique. Et puis c’était un moment différent du WE où nous étions les deux parents avec les enfants. Là, j’étais en tête à tête avec les petites.
Le mercredi matin, comme beaucoup de mamans, j’accompagnais ma cadette de 4 ans à un atelier de découverte musicale (de 10 à 11h) pendant que j’accompagnais la petite dernière à la bibliothèque, située juste à côté de l’école de musique, où nous découvrions des livres et participions à de petites animations (lecture de comptines, théâtre de marionnettes). Ca permettait à la plus grande de découvrir la musique, et aussi ça me permettait de passer un moment avec uniquement la petite dernière.
Dans ma commune, comme dans 99% des communes qui ont mis en place la réforme, l’école aura lieu le mercredi matin de 8h30 à 11h30. Les TAP (activités d’éveil) seront répartis sur 2 jours, de 15h00 à 16h30.
Toutes les activités du mercredi matin sont donc reprogrammées à d’autres créneaux horaires, soit le mercredi après-midi soit le soir de 18h à 19h.
Concrètement, j’ai décidé d’arrêter l’éveil musical avec la grande (les horaires proposés ne me convenaient plus), qui de plus, ne pourra plus venir avec nous aux ateliers de la bibliothèque municipale (je la récupérais souvent à 11h pour rejoindre les ateliers).
Merci la réforme.
Finalement, l’Etat se substitut (partiellement) au projet parental que souhaitaient mettre en place les parents qui avaient réduit leur temps de travail pour initier leurs enfants à des activités sportives ou artistiques.
Certes, cela est favorable aux enfants dont les parents travaillent le mercredi, car cela leur permet de découvrir de nouvelles activités (pour les communes qui jouent le jeu, ce qui ne représente pas la totalité des communes qui ont mis la réforme en place). Cela favorise aussi les enfants dont les parents se fichent de la sensibilisation à l’art, à l’écologie ou à tout autre activité d’éveil au monde.
Toutefois, Mesdames et messieurs les réformateurs,
-Sachez que j’ai toujours passé énormément de temps avec mes enfants, à faire du bricolage, de la lecture ou toute autre activité d’éveil,
-Sachez que, en m’obligeant à mettre ma petite à l’école le mercredi matin, vous me privez d’une demi-journée que j’aurai pu passer avec mon enfant à lui faire découvrir le monde qui l’entoure, ce qui est, à mon humble avis, est plutôt le rôle des parents que celui de l’école.
-Sachez que beaucoup de mamans choisissent, malgré la réforme, de rester à 80%, car elles ne se voient pas reprendre le travail le mercredi matin pour être à 11h30 pétantes à la sortie de l’école, et qu’elles font aussi ce choix parce que bien souvent, elles ont d’autres enfants qui, eux, ne vont pas encore à l’école,
-Sachez aussi que le temps de travail n’est pas modulable à merci (une heure par ci, deux heures pas là), que bien souvent, en région parisienne, cela ne vaut pas le coup d’aller travailler pour 3 heures (compte-tenu des temps de trajet domicile-travail),
-Sachez aussi que ma cadette ne comprend pas pourquoi maman reste avec sa petite sœur le mercredi matin, alors que elle, elle doit aller à l’école (j’ai essayé de lui expliquer par A + B avec un tableur EXCEL que c’était pas intéressant que maman retourne travailler le mercredi matin, mais je crois qu’elle a pas vraiment compris ma démonstration…),
-Enfin, sachez que ma grande qui a 13 ans aujourd’hui, n’a quasiment pas connu l’école sur 4 jours et demi (abandonnée en 2008), et qu’elle s’en porte parfaitement bien. Elle a su lire dès la fin du premier trimestre en CP et elle écrit même aujourd’hui des romans,
Mais en France, encore une fois, on tire le modèle éducatif vers le bas, en se basant sur des statistiques qui ne veulent rien dire, comme le pourcentage d’enfants qui ne savent pas lire à l’entrée en 6ème, sans tenir compte des raisons qui sont responsables de ces mauvaises statistiques (comme le désintérêt probable des parents pour l’éducation de leur(s) enfants).
J’espère en tout cas que nous verrons très bientôt les résultats de votre géniale réforme ??? (tenez-nous au courant de vos statistiques quand même).
En attendant, je passerai moins de temps avec mes enfants le mercredi. Et je ne vous dis pas merci.